Considéré comme le plus ancien quartier réservé aux Marocains de confession juive, le Mellah de Fès date de 1438. Aujourd’hui vidé de sa population d’origine, il fait l’objet de nombreuses rénovations et d’une mise en valeur qui répondent à l’engagement formulé par Sa Majesté Mohammed VI de préserver la composante hébraïque de l’identité nationale.
Les Mellahs du Maroc, un monde disparu
C’est un peu à l’extérieur de la médina ancienne, en bordure de l’esplanade ou trônent le Palais Royal et ses sept majestueuses portes en cuivre ciselé, que l’on trouve le Mellah de Fès, le premier mais aussi l’un des plus importants des Mellahs du Royaume.
Comme tous les quartiers autrefois dévolus à la communauté juive, il fait aujourd’hui office de témoin d’une coexistence millénaire entre Juifs et Musulmans, qui s’est interrompue net au milieu du XXe siècle.
Durant la Seconde Guerre mondiale, sous protectorat français et donc soumis aux lois de Vichy, le Roi Mohamed V refusa la déportation des Marocains de confession juive vers la France collaborationniste.
Malgré cela, en réaction à des persécutions régulières mais aussi à la pauvreté, un flux d’émigration s’est peu à peu instauré autour de 1950 vers l’Amérique Latine, les États-Unis, le Canada et la France, pour se transformer ensuite en un exode massif vers l’État d’Israël nouvellement créé.
Le Roi Mohammed VI, actif défenseur de l’héritage judéo-marocain
En 1948, le Maroc comptait encore quelques 260.000 citoyens de confession juive, un chiffre réduit à seulement 3.000 selon une estimation de 2022, mais qui constituerait encore la communauté juive la plus importante d’Afrique du Nord.
La rue Bou-Khessissat à l’entrée du Mellah, avec ses balcons ouverts sur l’extérieur, à la différence des maisons traditionnelles musulmanes qui sont ouvertes sur l’intérieur.
Conscient de l’importance de cette dimension historique de la société marocaine, le Roi Mohammed VI a fait le choix dès 2011 d’intégrer la composante hébraïque dans le préambule de la Constitution marocaine, à égalité avec ses apports arabo-islamique, amazigh, saharien, andalou, et méditerranéen.
Puis 2022 a vu la création de trois nouvelles institutions, dont le Conseil national de la communauté juive marocaine. Concrètement, cette volonté politique se traduit notamment par l’aide à la rénovation de lieux de culte, de cimetières mais également par la création de lieux de dialogue interreligieux tels que :
- Bayt Dakira – La Maison du Souvenir, ouverte en 2020 à Essaouira ;
- et le futur Musée de la Culture Juive à Fès (dont les travaux se sont achevés en 2023, mais n’est pas encore ouvert).
Les synagogues, cœur battant de l’histoire du Mellah
Il fut un temps où le Mellah de Fès comptait 17 synagogues en activité. Elles ne sont aujourd’hui plus que deux, soigneusement restaurées dans les dernières décennies. Toutes deux peuvent se visiter et sont aujourd’hui entretenues par des gardiens musulmans.
La Synagogue Aben Danan est dissimulée derrière une toute petite porte sans signe distinctif, semblable à celles des habitations qui l’entourent. Datant du XVIIe siècle, elle était dévolue au culte des Megorachim, les Juifs chassés d’Espagne en 1492 et exilés massivement au Magheb.
Classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, elle a été magnifiquement rénovée et inaugurée en 1999.
Photos 1 et 2 : Entrée et intérieur de la synagogue Aben Danan
Photo 3 : Intérieur de la synagogue Al Fassiyine
La Synagogue Slat Al Fassiyin serait la plus ancienne du Mellah et sa fondation remonterait au XIVe siècle environ. Elle abritait les rituels des Juifs Tochavim, autochtones du Maghreb, et dont nombre d’entre eux étaient berbères.
Ouverte jusqu’à la fin des années 1950, elle est progressivement tombée en ruine, après avoir servi d’atelier de fabrication de tapis et de salle de boxe ! Elle a été restaurée en 2013.
Le cimetière israélite de Fès
Situé à l’extrémité sud du Mellah, le cimetière juif est particulièrement impressionnant avec ses milliers de sépultures d’un blanc immaculé, écrasées de soleil. Il a été entièrement restauré en 2015, ainsi que ses trois petites synagogues, qui servent de musée et de lieu de prière pour les visiteurs.
Implanté sur ce site depuis le XIXe siècle, le cimetière compte aujourd’hui environ 22.000 tombes et sert de lieu de repos à de nombreuses personnalités historiques, politiques et religieuses dont le Rabin Yehuda Ben Attar, décédé 1733 et dont la sépulture fait l’objet d’un important pèlerinage annuel.
Photos 1 et 2 : Entrée et intérieur du cimetière
Photo 3 : Vue depuis la terrasse de la synagogue Aben Danan
Recommandations du Palais Faraj
La visite du Mellah prend toute sa valeur avec un guide qui saura faire revivre pour vous l’histoire du quartier et de ses anciens habitants.
Elle peut être réalisée seule ou être incluse dans les visites guidées de la médina.
N’hésitez pas à vous renseigner à l’accueil du Palais Faraj pour organiser une visite à votre convenance.
Tinghir Jérusalem, les Echos du Mellah (sur Youtube)
Un film de Kamal Hachkar – 2013 – 53mn
Langues : Arabe, hébreu, français (sous-titres français)
Un documentaire extrêmement émouvant qui suit le destin de la communauté juive de Tinghir, partie vers Israël dans les années 1950-60.
